Pour présenter la grande Assia Djebar, rien de mieux que de vous évoquer une de ces citations : “Quand j’écris, j’écris toujours comme si j’allais mourir demain. Et chaque fois que j’ai fini, je me demande si c’est vraiment ce qu’on attendait de moi puisque les meurtres continuent. Je me demande à quoi ça sert. Sinon à serrer les dents et à ne pas pleurer”.
[dropcap type=”default”]A[/dropcap]ssia Djebar est née l’été de 1936 à Cherchell, près d’Alger, ville où l’histoire est immensément riche mais encore inexploitée. Elle a sans doute hérité de cette force et de cette richesse qui caractérise Cherchell. Elle entre d’abord à l’école coranique et l’école primaire à Mouzaïaville, puis les études secondaires à Blida, et à Alger, pour arriver à l’Ecole Normale Supérieure de Sèvres. Elle est par la suite nommée professeur à New York University.Elle a connu très jeune le succès en tant que romancière, écrivant son premier roman en pleine guerre d’indépendance. Puis elle consacre une vingtaine d’années à l’enseignement et au cinéma (elle est la première femme cinéaste algérienne). Les grands questionnements sur l’islam, la place de la femme dans la société, mais également le rapport de l’écrivain à la langue, traversent son oeuvre. Elle a reçu le Neustadt International Prize for Literature (l’équivalent américain du prix Nobel). Elle a notamment publié : La Soif (1957), Loin de Médine (1991), Oran, langue morte (1997), Les Nuits de Strasbourg (1997). En 1994, Assia Djebar reçoit le doctorat d’honneur de l’Université de Vienne. De plus, elle sera la première personnalité maghrébine à entrer à l’Académie française.
La guerre d’Algérie entre alors dans sa quatrième année. C’est à Tunis qu’Assia Djebar, tout en préparant son diplôme d’histoire à l’université, rédige pour El Moudjahid auprès des réfugiés algériens à la frontière, les enquêtes dont elle s’inspirera pour la toile de fond de son quatrième roman Les Alouettes naïves. En 1957 elle se rend au Maroc, enseigne l’histoire de l’Afrique du Nord à l’université de Rabat, et s’occupe d’activités culturelles dans le cadre d’organisations algériennes. De retour en Algérie en 1962, elle entreprend de multiples activités : enseignements à l’université d’Alger (histoire moderne de l’Afrique et, entre 1974 et 1976, sémiologie du cinéma), collaboration avec la presse, la radio, et la télévision, et réalisation en 1977 d’un long métrage La Nouba des femmes du Mont Chenoua qui obtient le prix de la Critique à la biennale de Venise en 1979.
L’oeuvre d’Assia Djebar est singulière puisqu’elle nous donne des repères sur différents jalons biographiques à travers l’Histoire du pays, le tout adroitement recréé par la fiction.
La Soif, son premier roman est très important pour elle, puisque c’est à partir de là que s’est manifesté chez la romancière un certain art de la création, celui qui consiste à réussir les nuances.
L’Amour, la fantasia publié en 1985 est le roman qui a le mieux tiré profit de la formation d’historienne de son auteure. Portée à son plus haut degré d’élaboration, l’oeuvre, par sa puissance d’évocation historique et sa capacité de création poétique, peut être, dans le champ de la littérature algérienne encore à la recherche de formes spécifiques d’accomplissement, considérée comme un événement. Le regard djebarien revendique constamment deux fonctions qui s’inscrivent formellement dans le prolongement l’une de l’autre. La première accessible à une interprétation à la dimension d’un vécu, d’une histoire, d’une société, sert un projet de représentation; la seconde réglée par la coprésence de figures productrices de spectacle et apparemment peu affectées par le sens ne sollicite rien d’autre que la contemplation ; elles ne sont là que pour fertiliser un paysage de formes, de couleurs et de sons : des exemples éloquents nous sont fournis par les passages descriptifs où sont exhibées des expressions corporelles.
Écrivaine, porte parole des femmes séquestrées, écrivaine témoin d’une époque historique, écrivaine stimulant la mémoire des aïeules et secouant les archives, écrivaine parcourant son corps et surprenant le couple, Assia Djebar est aussi “écrivaine architecte” qui éprouve les structures, confectionne des objets linguistiques, et qui en restant profondément ancré dans une idéologie de la représentation évolue vers une recherche sémiologique et une réflexion sur le processus de création. Certes Assia Djebar restera pour le public essentiellement une écrivaine femme qui parle de celles “qui baissent les paupières ou regardent dans le vague pour communiquer.” L’ oeuvre est alors lue comme une tentative de re-collection de paroles éparses, timidement énoncées, suggérées, arrêtées, interdites, refoulées qui “en pointillé” rétablissent le sens d’une histoire.
1 commentaire
pas la peine de faire connaître assia djabar à qui que ce soit une seule chose de vouloir demander prenez un de ses romans et fonçez les cénaristes et réalisateurs pour nous faire un film ou un feuilleton à la télé ayez ce courage pour faire reconnaître nos écrivains aux monde arabes s”il vous plaît, toujours hamida de annaba bisous